Articles, idées, astuces de la pionnière de la parentalité positive en France, Catherine Dumonteil Kremer
24 Septembre 2010
En introduction à ce mail que j'ai écrit pour la liste en 2005, j'aimerais dire que l'accusation de manipulation à l'égard d'un bébé est extrêmement sournoise dans ces effets.
Une parole insinuant que notre bébé (ou quiconque du reste) nous manipule et nous sommes alors tentés de voir absolument tous ses comportements au travers du filtre de la manipulation.
Pour reprendre ce que disait Marjorie, un pédiatre qui ferait de tels commentaires sur mon bébé n'aurait pas ma confiance... Un bébé ne manipule JAMAIS ses parents il tente parfois désespérément de combler ses besoins vitaux...
Ce mail parle à la fois de cette question mais aussi de celle épineuse du sommeil, bonne lecture !
"Cela fait plusieurs jours que je me dis que je vais répondre sur ce thème, mais le temps me manque parfois.
La question du sommeil a été cruciale pour moi avec trois enfants, dont deux de 16 mois d'écarts, j'avais le sentiment d'être toujours sur la brèche ! C'est même à l'occasion de ces premières années que je suis devenue diurne et couche tôt, alors que j'étais vraiment couche très tard ! Mon rythme a changé pour cadrer avec mes besoins de sommeil je pense.
J'en manquais beaucoup, même en dormant avec mes enfants, et pourtant le co sleeping est quand même apparu comme une méthode de survie, et aussi comme un moyen de répondre aux besoins de proximité permanents de mes petits.
Je n'ai pas dormi avec mon premier enfant, et je le regrette bien sincèrement, je crois que je vivais avec l'idée que rien ne changerait dans ma vie après sa naissance et j'essayais de faire en sorte que son emploi du temps cadre avec le mien plutôt que l'inverse. Il aurait pourtant été logique que je considère que ses besoins ne pouvaient être différés.
Mais je vivais aussi avec cette curieuse idée que ma fille me manipulait, que ses besoins de contact n'étaient pas légitimes.
D'ailleurs, je me rappelle très bien ma mère entendant Agathe pleurer, s'inquiétant à l'idée qu'elle ait faim ou soif, et revenant avec ma petite dans ses bras en me disant " tu vois, ce n'est rien, elle veut les bras, elle est quand même coquine !"
Et elle la recouchait aussitôt. Les bras, le contact, n'étaient pas considérés comme un vrai besoin, mais comme un caprice ! C'est terrible quand j' y pense...
Le contact est pourtant vital pour un bébé, et il va essayer de se débrouiller pour avoir sa dose malgré son manque d'expérience, sa fragilité, il est dépendant et sans défense, quand il crie ses besoins de son berceau, on peut l'ignorer, on ne risque rien, c'est bien plus simple de gérer un bébé qu'un bambin n'est-ce pas ? Il ne se déplace pas, ne se roule pas par terre, il crie son désespoir c'est tout.
Imaginez que vous ayez très très soif, et que les adultes autour de vous ne vous donnent pas à boire : " ce n'est pas l'heure, ou tu bois trop, je suis fatiguée de te donner à boire"
bref, vous êtes assoiffés et il n'y a personne pour vous donner à boire. C'est une véritable torture !
Imaginez vous vivre cela en tant qu'adulte... Vous remarquez qu'un simple sourire de votre part et vous obtenez un verre d'eau. A la prochaine situation de manque, vous essaierez de ne pas revivre cette traversée du désert, vous sourirez à la minute où vous aurez soif ! On vous accusera probablement de manipulation, et vous devrez chercher un autre moyen de combler vos besoins.
Il n'y a pas meilleur système pour rendre les personnes humaines complètement folles.
Avec les nuits ce que j'ai trouvé très difficile c'est cet espèce d'épuisement permanent.
Quand l'une dormait l'autre se réveillait, parfois Agathe était malade et elle me réclamait la nuit, même si c'était très rare, ça venait s'ajouter aux réveils de Coline et Claire.
J'ai trouvé des petites idées, je dormais dès qu'elles dormaient (plus facile à mettre en oeuvre avec un bébé qu'avec deux bébés), j'étais tendre avec moi même, je ne faisais pas grand chose d'autre qu'aller voir mes amies, (ce qui me ressourçait) m'occuper d'Agathe (on était en pleine période de nonsco), jouer de la flûte, dormir et manger lol. Pas de ménage, pas de projets éreintant, j'ai ralenti mon rythme.
Plus de relations sexuelles la nuit, le soir à partir de 20h30 je n'étais plus bonne à rien, alors on s'organisait en journée.
J'ai pris l'habitude de ne jamais coucher mes enfants, on dort ensemble, on va se coucher ensemble, pour les besoins de sommeil dans la journée, ils dormaient à peu près n'importe ou, j'avais aussi remarqué que le moindre changement de lieux et mes enfants dormaient moins bien, quand je partais trois jours quelque part par exemple, alors quand j'étais au bout du rouleau j'évitais les voyages.
J'ai aussi entendu parler de Marie thirion et de son bouquin sur le sommeil, certains parents disaient qu'elle leur avait sauvé la vie ! Je n'ai jamais pu avoir l'avis du bébé, mais ce que je peux dire chez les ados que je connais, c'est qu'il y en a beaucoup qui refuse d'aller se coucher, et qui tombent de sommeil, qui ne savent pas être à l'écoute de leur signaux corporels.
Crainte d'aller se coucher enracinée dans cette période ? Je le crois en tout cas.
Ce qui est certain c'est que mes propres besoins d'enfant non comblés ne m'ont pas aidé, ils ont décuplé mon épuisement.
Mes parents m'ont laissé pleurer trois mois seule dans le noir, et au moment de donner de l'attention la nuit, je me sentais vraiment tiraillée, comme s'il était inscrit que je ne devais pas le faire...
Ce que je peux dire c'est que tout ce qui peut favoriser l'attachement est très bon à vivre pour nous et nos enfants.
C'est sur la relation que nous construisons avec nos enfants que reposent l'accompagnement que nous allons vivre ensemble, tout ce qui favorise notre relation à nos enfants, ce qui développe la confiance qu'ils ont en nous, est essentiel.
Comment pourrions nous soutenir notre enfant s'il n'a pas confiance en nous ? Penser à long terme m'a aidé plus d'une fois, l'éducation c'est un ensemble de gestes quotidiens, et tout est important !
J'ai acheté récemment un livre sur le sommeil "Un sommeil paisible et sans pleurs" d'ELISABETH Panthley.
Il a quand même l'air plus humain que les autres, mais l'aspect manipulation pour faire dormir est quand même fort.
(selon moi).
Maintenant je pense que les parents débordés, épuisés, au bord de la séparation pourront y trouver quelques idées.
Sinon il y a les livres de Nathalie ROQUES sur le sommeil, un petit pratique jouvence de Claude didierjean sur le cododo, et toujours le livre du docteur Sears "Parent le jour, la nuit aussi" (c'est tellement juste) édité par la leche league, j'ai également beaucoup parlé de cette question dans "Elever son enfant autrement".
Pour finir quand on arrive (même si ce n'est pas chose facile) à combler les besoins de nos touts petits, ils engrangent de la sécurité et de l'amour pour plus tard, pour leur vie entière.
C'est un investissement coûteux en énergie, surtout pour nous qui n'avons pas reçu cela de la part de nos parents, mais rentable sur plusieurs générations.
Bon courage aux parents qui dorment peu ! Ce temps-là s'effiloche, et ne dure pas, d'autant plus lorsqu'on a pas lutté, fait la guerre à ses enfants. Compliqué, mais efficace.
Catherine Dumonteil Kremer
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